• Une Catalane au destin politique national

    Mathilde Taurinya-Péri (1902-1981)

    Avec opportunité, elle fut propulsée par le Parti Communiste Français sur la scène politique pour porté haut le nom de son mari Gabriel Péri, fusillé par les nazis en 1941.

    Mathilde Taurinya naît le 7 juin 1902 à Canet-en-Roussillon où ses parents son de modeste s ouvriers agricoles. Sa mère, Rose, née en 1873, dotée cependant d'une bonne éducation, avait épousé contre son gré – mais à cette époque c'était le père qui ordonnait et à qui on obéissait – un paysan de qui elle divorcera plus tard et elle se retrouvera seule, vers 1904, avec trois enfants en bas âge : Pauline née en 1898, Albert en 1900 et Mathilde en 1902.

    Le temps de la première guerre mondiale passe, les enfants grandissent. En 1923, la sœur aînée, Pauline, adhère aux Jeunesses Communistes, elle a 25 ans et, quelques mois plus tard, elle épouse André Marty, originaire de Perpignan, qui est déjà un militant communiste très engagé.

    Repérée par les cadres du parti, Pauline est envoyée en 1932 à Moscou où elle recevra pendant deux ans une formation d'agent de liaison.

    En 1936, elle part pour l'Espagne avec son mari, élu député communiste en région parisienne et investi d'une importante responsabilité au sein des Brigades Internationales. On sait que André Marty, lors de la guerre civile en Espagne, s'y fera une réputation de « stalinien sanguinaire ».

    Pauline, en Espagne, rencontre un combattant républicain, Vicente Talens-Inglas, qui fut gouverneur de la province de Alméria et chef de la Sécurité de la ville de Valence.

    Elle en devient amoureuse et un enfant naîtra en 1937 de cette liaison, une fille appelée Pauline , comme sa mère. En 1938, André Marty et Pauline divorceront.

    Lors de la Retirada, après la victoires des troupes de Franco sur les Républicains, Pauline et sa fille, appelée familièrement Pépette, seront internées au camp de Rieucros, en Lozère. Ce camp recevra les combattants de la guerre d'Espagne, les étrangers et « les femmes indésirables et suspectes ».

    Entretemps, Mathilde, la sœur cadette, s'est mariée elle aussi en 1927 avec un militant communiste, Gabriel Péri, alors chef du service de politique étrangère du quotidien du parti « L'Humanité ».

    Leur vie commune sera interrompu en 1929 par l'emprisonnement de Gabriel Péri pendant un an pour raisons politiques. Il sera cependant élu député communiste en Seine-et-Oise en 1931 et réélu en 1936.

    Mères, filles et petite-fille internées à Rieucros

    Mais, là aussi, le couple Péri-Taurinya bat de l'aile, car dès le début de la seconde guerre mondiale, Gabriel Péri partage sa vie avec une journaliste, Sofia Jancu. Il n'est pas présent lorsque son épouse et la mère de cette dernière sont internées à leur tour au camp de Rieucros où elles retrouveront Pauline et sa petite Pépette. Tragique destin pour le père de Pépette, Vicente Talens-Inglas, qui sera fusillé le 20 juin 1940 à la prison Paterna de Valence, en Espagne.

    C'est à Rieucros que Mathilde Péri apprend l'arrestation de son mari par la Gestapo, le 18 mai 1941, et son exécution au Mont Valérien, le 15 décembre suivant. Sa dépouille, que nul n'a pu identifier avec certitude, a été enterrée sans identité quelque part dans un cimetière de la région parisienne.

    Les deux sœurs Taurinya, Pauline et Mathilde sont désormais veuves. Quelques heures avant sa mort, Gabriel Péri avait écrit ces mots à son avocate : « C'est vous qui annoncerez à Mathilde que je suis mort la tête haute. Dites-lui que j'ai eu un repentir : Celui de ne lui avoir pas toujours fait la vie sérieuse qu'elle méritait. Mais dites-lui de porter fièrement le voile de veuve ».

    Par la suite, traité en héros, le nom de Gabriel Péri sera donné à de nombreuses rues et place de France. Il y a une place Gabriel Péri à Perpignan.

    Malade à sa sortie du camp de Rieucros, Mathilde est placée en sanatorium puis elle part pour le Vercors où elle s'engage dans la Résistance.

    Députée et juge à la Haute Cour

    Sa carrière politique débutera lorsque le parti communiste, opportuniste, lui demandera de porter haut le nom de Gabriel Péri et en fera l'une des figures de proue en région parisienne. Membre de la commission politique désignée par le Comité Central début 1945, elle est d'abord déléguée à l'Assemblée consultative provisoire en 1944, députée aux deux assemblées constituantes de 1945 et 1946 puis élue députée de la 1ère circonscription de Seine-et-Oise (Argenteuil-Bezons) en 1946, 1951 et 1956. Elle sera vice-présidente de l'Assemblée Nationale en 1946-1947 puis en 1951 et présidente de l’Association des Familles de Fusillés.

    Le 4 juillet 1946, elle est désignée jurée à la Haute Cour de Justice, puis juge titulaire le 11 mars 1947. Le 17 juin 1951, c'est sous le nom de Mathilde Gabriel-Péri qu'elle est réélue, la liste communiste emportant 32,2% des voix. Mieux encore en 1956 où sa liste obtient 36,4% des suffrages. Le parti la présente comme « la veuve du grand patriote Gabriel-Péri, fusillé par les nazis ». A l'Assemblée Nationale, son activité de députée sera essentiellement consacrée à la défense des familles de résistants, déportés, fusillés et anciens combattants. Elle présentera des dizaines de propositions de lois contribuant à améliorer le traitement des pensions.

    Contrainte fin 1952 de condamner son ancien beau-frère André Marty ainsi que Charles Tillon, bannis de leur parti, elle le fera à contrecœur et en souffrira profondément, ce qui sera sans doute à l'origine d'une insidieuse dépression qui ne la quittera plus. Aux législatives de 1958, elle perd son siège de députée, ravi par le candidat gaulliste Claude Labbé.

    En décembre 1960, elle n'est pas en mesure d'assister aux cérémonies données en l'honneur de Gabriel Péri. La police « croyait savoir qu'elle était hospitalisée en région parisienne après avoir refusé de se faire soigner en URSS ».

    Mathilde Gabriel-Péri décédera à Boulogne-Billancourt le 15 décembre 1941, quarante ans jours pour jour après son époux.

    Le camp de Rieucros

     Mathilde Taurinya-Péri (1902-1981)      Mathilde Taurinya-Péri (1902-1981)

    Premier camp d'internement en France, il a été créé en 1938 par Daladier, alors président du Conseil, devant « la nécessité de mener une action méthodique, énergique et prompte en vue de débarrasser notre pays des étrangers indésirables ». Le 18 octobre 1939, les premières femmes, une centaine environ, arrivent au camp, devenu depuis le 12 octobre « camp disciplinaire pour femmes indésirables et suspectes ». En janvier 1941, on relève la présence de 39 enfants de moins de 14 ans mêlés aux détenus. Des membres de la famille de Georges Charpack, futur Prix Nobel de Physique, Emmanuel d'Astier de la Vigerie, François Billoux, ancien ministre, ont été internés à Rieucros. 

    Article paru dans la Semaine du Roussillon


  • Comment bien se protéger

     Piratage de données bancaires et transactions en ligne

    La majorité des utilisateurs sont conscients de l’importance de bien assurer la protection de leurs données personnelles. Et pourtant, paradoxalement, le tiers de ces utilisateurs garde ses données bancaires sur un ordinateur familial. Ceci a été révélé par une étude effectuée par Kaspersky Lab alors qu’on sait pourtant que :

    -Pour  62% des utilisateurs, la perte de données financières constitue le plus grand danger qu’ils puissent courir.

    -47% d’entre eux sont préoccupés par le piratage des données bancaires lors des transactions qu’ils effectuent sur internet.

    -En France, 57% des utilisateurs ne disposent pas entièrement des moyens pour garantir leur sécurité sur internet.

    La cybercriminalité s’accroît de jour en jour et les hackers multiplient leurs attaques sur les sites de banques et ceux destinés à la vente en ligne. Raison pour laquelle, il est donc primordial de bien inspecter ses comptes de paiement en ligne afin de ne pas se faire surprendre.

    En effectuant des recherches sur internet, vous trouverez un bon nombre de conseils à suivre, lorsque vous êtes victime de piratage de votre compte.

    Cependant il existe une quantité énorme de symptômes révélateurs de piratage de votre compte. En voici quelques uns, répertoriés par Kaspersky Lab, pour vous permettre d’éviter toute tentative d’escroquerie sur internet.

    1. Bien surveiller son compte en veillant à ce qu’aucun imprévue ne s’y opère. Toujours signaler les incohérences en cas de retrait d’une somme, aussi petite qu’elle puisse être.

    2. Faire attention aux alertes Emails vous notifiant des modifications effectuées sur votre compte.  Si ce n’es pas vous qui avez procédé à ces modifications d’informations de votre compte, sachez qu’il a été piraté.

    3. Ne soyez pas victime du Phreaking qui est une technique de piratage selon laquelle le malfrat se présente, via un appel téléphonique, sous une fausse identité afin de vous soutirer des informations confidentielles qu’il pourrait utiliser contre vous. Dans ce cas, faites toujours une vérification auprès de votre fournisseur de service pour vous assurer que cet appel est authentique.

    4. Faire également attention aux SMS inhabituellement envoyés par votre fournisseur de services. Faites preuve de prudence si vous n’arrivez pas identifier l’origine de ces messages.

    5. Effectuer toujours une vérification des Emails que vous recevez sur votre messagerie personnelle. Ne pas répondre à une correspondance sans avoir, au préalable, bien identifié la personne qui vous l’a envoyée.

    6. Enfin, faire attention aux liens qui vous sont souvent envoyés. Veiller à n’ouvrir que ceux auxquels vous avez confiance car certains peuvent contenir des scripts, qui, lorsque qu’ils s’exécutent, envoient toutes vos informations confidentielles au destinateur de ce mails. Ce qui peut avoir des conséquences désastreuses pour votre compte. Alors soyez toujours prudent !

    Voila pourquoi il vous est recommandé de toujours procéder avec prudence lors de vos transactions sur internet.

    Outre toutes ces recommandations, il vous serait encore plus efficace d’installer un logiciel pour bien sécuriser vos applications web, ainsi que vos opérations de transactions en ligne, pour contrecarrer les attaques telles que « man in browser » grâce auquel  le hacker intercepte facilement vos données lorsqu’elles sont envoyées sur le web.

    Lors de cette attaque, le cybercriminel implante un ver qui affecte votre ordinateur et lui donne des privilèges, de façon à ce qu’il puisse contrôler toutes vos activités à distance.

    Ainsi, lorsque vous vous connectez pour effectuer une opération bancaire, il peut facilement se saisir de tout ce qu’il veut et même dérober tout votre argent.


  • (Imitation du site de votre banque, de votre accès internet etc...)

    Agir contre le phishing (Mails Arnaques)

    Il ne se passe pas une journée sans que nous retrouvions dans notre messagerie internet des courriels imitant de grosses enseignes (Paypal, Orange, Free,etc...)

    Ces derniers vous invitent à saisir des données confidentielles, identifiants et autres mot de passe sous peine de voir votre compte fermé suite à une erreur technique.

    Vous êtes en face d’une tentative de phishing, il est possible d’agir !

    On ne le répétera jamais assez, il convient d’être vigilant en permanence sur internet. Quelques règles simples permettent d’éviter ces pièges.

     Ne cliquez pas sur les liens dans les courriels, mais rentrez vous même l’adresse dans votre navigateur internet.

     Les fautes d’orthographe, de syntaxe et un ton menaçant dans le courriel doivent vous mettre en garde

     Ne répondez pas aux courriels douteux, mais vous pouvez le signaler en deux clics de souris dans Firefox par exemple : 

    Agir contre le phishing (Mails Arnaques)

    Menu " ?", puis "Signaler un site contrefait..." Remplissez la fiche qui prend déjà en compte

    Agir contre le phishing (Mails Arnaques)

    L’URL concernée, ainsi cette alerte sera traitée après vérification et le site apparaîtra avec un message d’alerte explicite 

    Agir contre le phishing (Mails Arnaques) 

    Si vous utilisez un autre navigateur, le site est disponible ICI

    Que faire si vous avez répondu à un courriel de phishing ?

     Si vous avez communiqué des informations bancaires, contactez rapidement votre banque pour faire opposition.

     Si vous avez fourni des codes personnels (mots de passe, etc.), modifiez-les immédiatement (avant qu’il ne soit trop tard !!) et surveillez attentivement ces comptes dans les semaines futures.

    Retrouvez notre dossier sur le phishing : Le phishing : ne pas se laisser piéger

    Un nouveau site soutenu par des grosses pointures du net permet de faire remonter également le site contrefait : Phishing initiative

    Désormais vous ne pourrez pas dire qu’on ne vous a pas prévenus ;-)


  •  Louis ESPARRE (1913-1943)

    En tant qu'agent des Services de Renseignements, il fut condamné au peloton d'exécution par les Allemands. C'était le 28 mai 1943, au Mont Valérien, il y a tout juste soixante-onze ans.

    C'est à Toulouges que naît le 29 octobre 1913 Louis Esparre, Fils de Pierre, fonctionnaire au PTT et de son épouse Isabelle Camo. Après l'École des Ponts et Chaussées et une licence en droit, il devient ingénieur des Travaux Publics. Il effectuera son service militaire dans le Génie puis revient dans le civil pour être affecté en 1937 dans le département de l'Orne comme ingénieur des Ponts et Chaussées.

    Mobilisé au début de la seconde guerre mondiale, il fait la campagne de France ce qui lui vaut déjà une citation à l'ordre du régiment. Le voici sous-lieutenant. Démobilisé après la « drôle de guerre » et l'armistice demandé par Pétain, il reprend son poste d'ingénieur dans l'Orne et son travail lui donne accès à tous les terrains d'aviation du secteur.

    Dès septembre 1940, il est recruté par un ancien officier du Service Renseignements, le S. R. Air, pour entrer en résistance et il devient rapidement le chef du secteur Normandie, monté en 1941 et qui dépend du poste principal de Limoges.

    Cette année-là, Louis Esparre épouse Jacqueline Doucet, la sœur d'un ami de promotion aux Ponts-et-Chaussée, Pierre Doucet, qui entrera également dans le réseau de Résistance.

    Le travail d'Esparre sera de fournir à ses supérieurs des croquis et des photos d'avions en bois et de matériel de camouflage que les Allemands utilisent pour tromper l'aviation alliée. La parfaite connaissance des aérodromes de la région sera un atout pour lui. Car, en effet, pour éviter les bombardements de nuit, les Allemands avaient aménagé, en parallèle à la vraie, de fausses pistes d'atterrissage où stationnaient de faux avions en bois. Lors des alertes, ils mettaient le feu à quelques- uns de ces leurres pour que les tirs de l'aviation alliée soient concentrés sur ce secteur et non pas sur l'aérodrome, laissé dans le noir. Esparre sait que ces leurres sont fabriqués à Caen et Pierre Doucet dénichera l'atelier de reproduction des plans. Appartenant à Henri Brunet, cet atelier a été réquisitionné par les Allemands et Brunet reproduit pour eux tous les plans, depuis les fameux avions en bois jusqu'aux travaux secrets des fortifications de la côte normande en cours de réalisation.Au péril de sa vie, et malgré une étroite surveillance allemande, Brunet s'organisera pour faire un tirage supplémentaire de tous les documents, plus de 4000 en tout.

    Tous ces plans, Esparre les fera parvenir à Paris et ils seront transmis à Londres. Certains plans déterminent les routes suivies par les bombardiers allemands se dirigeant vers l'Angleterre.

    Retour à Perpignan

    Mais Esparre est prévenu que des soupçons se portent sur lui. Sa vie est en danger. Sa hiérarchie, aux Ponts et Chaussées, va réagir rapidement et il est muté en zone libre, à la préfecture de Perpignan, en juin 1941. Il sera remplacé à la tête du réseau par celui qui était son adjoint, Robert Jeanne, officier de réserve de l'armée de l'Air et deux ingénieurs l'assisteront. En fait les Allemands avaient des soupçons sur le travail d'Henri Brunet et mieux valait isoler les personnes gravitant autour de lui.

    Malgré une perquisition effectuée dans son atelier, Brunet va continuer à reproduire clandestinement les photocalques des plans allemands.

    A Perpignan , Esparre a en charge l'entretien du réseau routier de dix-sept communes. Il supervisera également le renforcement des rives de nos rivières contre les inondations. On lui attribuera le 10 novembre 1942 le contrôle des transports de marchandises. A ce moment-là, tout le pays est occupé par les Allemands.

    Le 11 novembre 1942, les Allemands déclenchent une vaste offensive militaire sur tout le territoire. Dans l'Orne, Henri Brunet et Robert Jeanne sont arrêtés. Un à un, les membres du réseau sont neutralisés et emprisonnés.

    Le 18 décembre, au petit matin, Louis Esparre subit une perquisition de la Gestapo à son domicile et il est emmené. Il sera d'abord interrogé à l(hôtel de la Loge puis transféré à la prison de Fresnes, à Paris. Le 4 janvier seulement, la famille recevra un courrier de la police allemande l'avisant qu'il est détenu à Fresnes.

    Les prisonniers, en attente du Conseil de Guerre, n'ont droit qu'à une sortie de 10 minutes par semaine. La faim les tenaille, et pendant la détention de son mari, l'épouse de Louis Esparre, Jacqueline, donnera naissance à un garçon, le 3 février 1943. Louis ne l'apprendra que le 10 avril. Pour faire parvenir des nouvelles à ses proches, il usera de stratagèmes, par exemple un papier, écrit avec une patte de poulet et plié en quatre dans le couvercle d'un pot de confiture. Mais les épreuves les plus dures sont les interrogatoires. On saura plus tard que Louis Esparre a été torturé pendant plusieurs mois et qu'il n'a jamais parlé.

    Procès et verdict

    Le procès va se dérouler à Fresnes du 1er au 10 mai 1943. Un colonel allemand préside le tribunal et la consigne est de protéger sans faiblesse le Reich et le peuple allemand. En conséquence le verdict tombe, le 11 mai. La peine de mort est prononcée pour espionnage à l'encontre des six membres du réseau, dont Henri Brunet, Louis Esparre et son beau-frère Pierre Doucet. Les autres membres seront condamnés à des peines de prison. Dans l'après-midi du 17 mai, le père, la mère et l'épouse de Louis Esparre sont admis auprès du condamné qui verra pour la première fois, mais aussi la dernière, son petit garçon âgé de trois mois. Une visite d'à peine un quart d'heure dont on devine l'énorme poids émotionnel.

    Le 28 mai, dans la missive à ses parents, Louis Esparre, porté par la foi, dit qu'il pardonne tout le mal qu'on a pu lui faire et qu'il priera, de là-haut, même pour ceux qui ont contribué à le conduire au sacrifice suprême.

    L'aumônier allemand, qui a assisté à l'exécution, dira que Louis Esparre est mort en héros, qu'il a refusé d'être attaché et d'avoir les yeux bandés. Il tombera sous les balles ce 28 mai 1943 à 16 heures, au Mont Valérien, en même temps que son beau-frère Pierre Doucet et Robert Jeanne en criant : Vive la France !

    Louis Esparre fut d'abord inhumé au cimetière d'Ivry mais, par la suite, son père fit revenir sa dépouille à Perpignan où des obsèques solennelles furent célébrées le 10 octobre 1945. Il repose désormais à Toulouges, dans le caveau familial. Son beau-frère, Pierre Doucet a été inhumé à Sées, dans l'Orne, aux côtés de ses parents.

    Le 17 août 1948, lors de l'anniversaire de la libération de Perpignan, un petit garçon, en larmes, recevra pour son père la Croix de Chevalier de la Légion d'Honneur, devant le Monument aux Morts et les troupes présentant les armes.

    A titre posthume, Louis Esparre a été décoré de la Croix de Guerre avec palme et il a été cité à l'Ordre de l'Armée.

    Les villes de Perpignan, Juvigny-sous-Andaine (Orne) et Toulouges ont honoré la mémoire de Louis Esparre en lui dédiant des noms de rues ou de places.

     Louis ESPARRE (1913-1943)

    Article paru dans « La Semaine du Roussillon »


  • Retirada : l'enfance volée ou quand Louisette a dit adieu à l'insouciance

     Col de Balitres, février 1939. Photo/Manuel Moros, fond Peneff

    Louise Serra n'avait que 10 ans lorsqu'elle a vécu l'exil. 75 ans après, comment oublier ? Elle raconte.

    "Mon enfance s'est terminée le 31 janvier 1939". Ainsi s'achève le texte écrit l'an dernier, à l'occasion d'un atelier de la mémoire, par Louise Serra. Ou plutôt Louisette, Lluiseta. On l'a toujours appelée ainsi, pour la différencier de sa mère, Lluisa. Mais ce 31 janvier 1939, la petite fille a tout perdu de son insouciance, à part peut-être ce diminutif.

    La phrase

    "Au camp il y avait une résistance. On n'était pas des moutons. Il y avait une solidarité. On n'était pas des bêtes mais des êtres humains".

    Ce jour-là, aux côtés de sa maman, elle a quitté sa terre de naissance. Pour toute la vie. 75 ans après, dans son logement situé dans une résidence pour personnes âgées de Perpignan, elle en parle comme si elle le revivait. Et pourtant. Elle n'avait que 10 ans.

    "Nous étions à Port-Bou, hébergés par des personnes que nous avions accueillies nous-mêmes, dans notre village de Ulldecona, au-delà de l'embouchure de l'Ebre. Le 31 janvier, on a su que la frontière allait être ouverte pour laisser passer les femmes, enfants, personnes âgées ou malades. Nous sommes montées jusqu'au col. A midi, les gendarmes nous ont dit que l'on pouvait passer. Quelques heures plus tard, ils ont refermé".

    Un frère que l'on revoit 17 ans après 

    La barrière est retombée, tel un couperet sur l'espoir de retour. Derrière elle, Louisette a laissé bien plus qu'un pays : une famille. "Avec maman, nous avions fui notre village, dans un camion, dès le 5 avril 1938, en raison de l'avancée des troupes franquistes. Papa, qui était adjoint au maire, était resté là-bas pour poursuivre son activité, même s'il ne pouvait rejoindre l'armée républicaine en raison de sa santé. Mon petit frère, qui avait 5 ans et qui était malade, est resté à la campagne chez mes grands-parents. Je ne l'ai revu que 17 ans plus tard…".

    Son père, elle le retrouvera quelques mois après. Il a franchi la frontière peu de temps après sa femme et sa fille, le 12 février. Et comme tant d'autres, il a rejoint aussitôt le sordide camp d'Argelès, à même la plage. Louisette et sa mère ont évité, au moins un moment, cette destination indigne. "Arrivées à Cerbère, maman a pu téléphoner à des connaissances que nous avions à Latour-Bas-Elne, qui nous ont récupérées". Elles étaient libres, c'était déjà bien. Mais Louisette se souvient comment elle était "la rouge", que l'on oblige à faire sa communion pour pouvoir aller à l'école des bonnes sœurs.

    "Je n'en ai jamais voulu à la population française, jamais. Mais à la presse, oui. Et au clergé, qui répandait des choses horribles sur les Républicains". Mais elle se rappelle aussi des marmites que les habitants du coin amenaient sur le bord des routes, pour donner un peu de chaleur aux réfugiés qui déambulaient, transis de faim et de froid.

    Suppléments d'âmes dans le camp  

    La faim, le froid, et pire encore : Louisette finira hélas par les connaître. "En septembre 1939, au moment de la déclaration de la seconde guerre mondiale, le gouvernement français a décidé que les Espagnols non déclarés devaient aller dans un camp. Alors, on nous a emmenées".

    Elle s'insurge encore, dans un haussement d'épaules : "Franchement… Comme si une femme de 40 ans et une gamine de 10 ans pouvaient représenter un risque ? Etre des espionnes, peut-être ?…"  Et c'est ainsi que Louisette et sa mère n'ont pu échapper à l'enfer d'Argelès. Elles y ont survécu huit mois, jusqu'à ce que le père, interné sur la même plage, soit engagé comme bourrelier par l'armée française, à Rennes. "Il a pu réclamer sa famille, comme on disait, et nous l'avons rejoint".

    Pendant l'internement, Louisette n'a vu son père qu'une fois. "On ne pouvait pas se voir. Le camp des hommes, à droite, et celui des femmes et enfants, à gauche, étaient séparés par un petit torrent, et, comme si cela ne suffisait pas, par des barbelés".

    Parfois, la noirceur était éclairée par des suppléments d'âmes. Celui de ce gendarme français par exemple, qui a permis à la petite fille de voir son papa. "Mon père l'avait contacté. Il est venu me chercher dans notre baraque, qui était près de l'eau. On est remontés par la mer pour contourner les barbelés, et j'ai pu passer la journée avec mon père. Le gendarme m'a raccompagnée le soir".

    Louisette insiste : "Dans les camps, on était solidaires. On n'avait rien, mais on était solidaires. Des institutrices espagnoles nous faisaient la classe. Avec pas grand-chose : un morceau de craie, un bout de papier. Ce n'était pas tant pour enseigner. Surtout pour montrer que la vie continuait".

    Souvenirs douloureux et hommage aux mamans

    Un cri qui poursuit 

    Longtemps, un cri a hanté Louisette. "Un jour, une femme a accouché dans la baraque à côté. Elle a réussi à le faire savoir à son mari, qui était dans le camp des hommes. Il a voulu sauter les barbelés pour venir la voir. Mais il a été embroché par un garde…"

    La vielle dame s'arrête, ferme les yeux et reprend : "Le cri de cet homme m'a longtemps poursuivie et réveillée en sursaut dans la nuit. Cela s'est estompé lorsque je suis revenue et que je suis allée dans les camps. C'était comme si j'avais fait un retour sur moi-même".

    Ce retour, c'était en 1980. A cette date, elle est venue passer sa retraite à Perpignan avec son mari Miquel, qu'elle a connu en 1945, et disparu en 1989. Lui aussi a connu l'exil, mais également la barbarie des camps nazis.

    "Malgré tout, j'ai eu beaucoup de chance, je suis une femme comblée. J'ai eu un mari magnifique, trois fils qui ont réussi", sourit pourtant Louisette. Elle montre les photos de bébés qui occupent tout un mur de sa chambre : ses fils, ses 5 petits-enfants, ses 3 arrière-petits-enfants. Elle les passe en revue avec fierté, indique leurs lieux de naissance et de résidence, en différents points du globe. Pour Louisette, il n'y a plus de frontière qui tienne, juste un amour sans limite.

    Grâce aux mamans (extraits de témoignages recueillis par l'association FFREEE)

    L'an dernier, plusieurs "enfants de la Retirada", réunis par l'association Fils et Filles de Républicains Espagnols et Enfants de l'Exode (FFREEE), ont témoigné.

    Extraits de ces récits émouvants, réunis dans un DVD. Avec, en guise de fil conducteur, un hommage vibrant aux mamans.

    Gilbert Susagna, né en septembre 1935. Originaire de la province de Lleida. Passé en France en janvier 1940. A connu les camps de Bram, Argelès, Rivesaltes. "J'ai un souvenir extrêmement ému de mes parents et de cette période. Mais je dois dire que, si je suis un vétéran des camps, je n'ai pas de mauvais souvenirs. Pourquoi ? Parce que j'avais avec moi l'amour de ma mère. Et l'amour de ma mère, c'est une panacée. Le chemin te paraît plus court. Elle te protège de tout ce qui peut t'atteindre".

    Roser Gilbert Coll. Elle avait un an et demi quand elle est passée en France avec sa mère. "Ma mère est allée de refuge en refuge, dans des maisons inhabitées. Elle a fait beaucoup de sacrifices. Elle ne mangeait rien, elle me donnait tout. Tous les jours, elle allait à la rivière et elle me peignait, parce qu'il y avait beaucoup d'épidémies de poux, de punaises, de choses comme ça".

    Miguel Martinez, né en 1931, originaire de Valence. Il a fait la traversée en mars 1939 avec ses parents. A Oran, il a été séparé de son père et a été interné avec sa mère dans la prison désaffectée de la ville. "Il me reste des flashs (...). Une des images marquantes, c'est quand ma mère comme toutes les femmes, ainsi que nous les enfants, nous sommes passés à la désinfection. Toutes ces femmes nues, qui recevaient ces jets... (...). A la prison d'Oran, il n'y avait pas d'eau courante, mais il y avait un puits. Alors nous, les enfants, on passait notre temps à puiser l'eau et à la ramener dans les chambrées. Oui, voilà ce que l'on faisait de nos journées". 

    Article paru dans L'Indépendant