• La tour Madeloc

     La tour Madeloc

    La tour Madeloc, c'est la vigie de la Côte Vermeille, du versant oriental de l'Albère. Depuis que la route est interdite aux véhicules à partir de la Casernes de Gauche, son parcours est devenu une agréable promenade familiale, mais goudronnée.

    Perchée à 656 m d'altitude, la tour Madeloc a de la gueule. Ronde, tout en schiste des Albères, cette belle vigie de la Côte Vermeille surveille l'horizon depuis 1285 grâce à une décision de Jacques II de Majorque. Opposé à son frère Pierre III, le roi d'Aragon, il décida de fortifier la frontière afin de parer à une de ses invasions. Dans le maillage serré de tours, de châteaux et d'ermitages, la Madeloc surveillait la mer, la plaine du Roussillon et les crêtes du massif de l'Albère. Et elle communiquait avec ses voisines grâce à un système de feux, la nuit et de fumée le jour.

    Depuis le Bas Moyen-Âge, on dirait que rein n'a changé dans cette partie du Roussillon. Tout démarre à l'entrée de Collioure. Prendre à droite la route du hameau du Rimbau.

    En plein dans l'axe du fort de Sain-Elme, il faut savoir se perdre dans le vignoble des banyuls et collioure, 15 kilomètres de long sur 6 de large, le plus petit de France. Et surtout le plus original. Au-dessus du corps tordu des chênes-lièges, dans le sillage du parfum délicieux des mimosas et des micocouliers, voilà la gravure de 1700 hectares de vignes. Plantés en terrasses (en «feixes» en catalan), ils forment d'immenses amphithéâtres retenus par près de 6000 kilomètres de murettes de schiste et découpés en peus de gall (pieds de coq). Ces canaux, inventés au XIIIème siècle, évacuent les eaux de pluie. Et pour abriter les outils, les vignerons des trois caves coopératives et des vingt-cinq particulières, sculpteurs de cette montagne, ont bâti 2000 casots ou «barraca». Le sang de ce terroir âpre et farouche offre ainsi un délicieux vin doux naturel.

    La tour Madeloc

     Notre-Dame de la Consolation

    Cette route étroite et tortueuse file déjà vers l'ermitage Notre-Dame de Consolation. En semaine, hors saison, on peut encore y descendre et s'y garer pour goûter au charme ombragé de ce site et aller voir les ex-voto de peintures marines et de modèles réduits de barques. Au-dessus de ce lieu de pèlerinage dédié à la pluie, se trouve justement le chemin de l'eau, depuis la Font d'en Cassanyes, à 680 mètres d'altitude, sous la tour de la Massane. Crée entre 1890 et 1892, avec des matériaux portés à dos d'hommes et de mulets, ce réseau hydraulique de 8,200 kilomètres alimente encore Port-Vendres. Pour mieux tout voir, il faudrait rester au rythme des coureurs cyclistes qui régulièrement montent sur cet itinéraire. 

    Le panorama sublime s'arrête sur un patrimoine militaire, malheureusement abandonné : les batteries 500, Taillefer, la Galline, les casernements et la redoute Dugommier (Quand est-ce qu'on prendra conscience de ce patrimoine ?). La côte avait été fortifiée en 1880 grâce au général Bergé, afin de résister à une invasion espagnole.

    Le parcours démarre à l'intersection des Casernes de Gauche, à 454 mètres d'altitude. Mais il n'y a de la place que pour 5 voitures ! Il aurait fallu penser avant à un parking. L'accès pour les marcheurs s'effectuent par le versant Est, sur la dernière partie de ce circuit des Crêtes. Le parcours est malheureusement encore goudronné. On attrape le vent dès le premier grand virage à droite, de la batterie 500 (appelée ainsi parce qu'elle est située à cette altitude, à 4 mètres près). Monter à la Madeloc, c'est aussi indispensable que de monter au Canigou. Comme la Torre del far, Força Réal ou le Canigou, c'est un amer qui se voit de loin. Ici viennent en général se promener les retraités du secteur. La pente est soutenue, à 14 % ! Il n'y a plus qu'à se courber. Les lames de schiste sortent régulièrement des côtés. L'horizon s'ouvre au sud vers le col de Banyuls. De là, on pourrait reprendre l'ancienne voie romaine qui venait de Ravaner et montait vers le col Banyuls. En 1793, les Banyulencs y ont battu les Espagnols. Le souvenir de cette formidable bataille est gravé à la mairie sur une énorme fresque et par la présence d(un petit obélisque sur la place de la mairie. Territoire de contrebandiers, Banyuls conserve aussi sa mémoire dans le vieux quartiers de pêcheurs de Cap d'Ona (prononcez Cap d'Oun), dédale de ruelles en escalier où vit aujourd'hui la chanteuse Teresa Rebull et où Patricia Barthas, qui cultive depuis 1996 des cactus, les conjugue sous forme de vinaigre, confiture, jus de fruits et bière à sa table de Barbarine. De là-haut, le paysage commence à offrir un vaste panorama sur la baie de Paulilles dont le Conservatoire du Littoral termine la restauration de l'ancienne usine de dynamite Nobel sur les 32 hectares achetés en 1998. Les deux étages et les meurtrières de la Madeloc réapparaissent au-dessus du ravin.

    Un dernier coup de rein, et voici à gauche au loin, derrière un rocher de schiste, la tour de la Massane qui se dresse à 794 mètres. Elle était en liaison avec le château d'Ultrera, celui de Laroque et enfin Collioure, résidence d'été des rois de Majorque. Dommage que la Madeloc, modifiée par Vauban au XVIIème siècle serve de nos jours de relais pour la télévision (656 m, 40 min). Si vous avez le temps, continuer en crête vers la batterie Taillefer, en empruntant les escaliers de schiste derrière. Comptez 1h30 aller-retour pour cette option. Sinon, le temps de retour au point de départ en faisant juste la Madeloc demande 30 minutes. Soit une ballade d'une heure 10 minutes.

    La tour Madeloc

    Notre-Dame de la Salette

    Vers le sud-est, la route lézarde jusqu'à Notre-Dame de la Salette, une chapelle blanche, isolée sur un mamelon face à la mer. Tout à l'heure, on reprendra la voiture et on descendra cette route, tout en pensant à cette journée de mai 1905. Henri Matisse rend visite à Maillol à sa métairie du vallon de la Roume, à 4 kilomètres de Banyuls-sur-Mer alors qu'il achève « La Méditerranée ». L'écrivain aventurier Georges-Henri de Monfreid et le peintre Louis Bausil sont là. Ce moment de grâce sera prolongé en allant découvrir ce site, reconverti en un modeste musée, depuis 1994 grâce à Dina Verny. On peut ainsi se promener entre lithographie et statuettes et devant le tombeau de l'artiste, installé dans le jardin depuis 1961. En regrettant que la statue de Maillol à Port-Vendres, elle, continue de se dégrader.

    Article paru dans La Semaine du Roussillon

     





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